Mozart à Paris

Frantz Duchazeau

Casterman

  • Conseillé par (Libraire)
    7 décembre 2018

    Mozart intime.

    Mozart? Vous connaissez bien entendu. Sa musique, sa rivalité avec Salieri. Mais son mal être à devenir un génie? Sa difficulté à vivre avec les autres? Peut être moins. Ou pas du tout. Frantz Duchazeau profite du séjour du compositeur à Paris pendant quelques mois pour nous faire découvrir un Mozart intime. En souffrance.

    « Amadeus » de Milos Forman a donné pour longtemps une vision agitée du plus grand compositeur d’opéra de l’histoire. Plus silencieux, le Wolfgang Amadeus du dessinateur Frantz Duchazeau, est néanmoins fidèle à cette agitation frénétique du compositeur qu’il trace à traits à peine esquissés et qu’il vêt d’un costume rouge, pour le distinguer des autres mortels contemporains. Quand il arrive à Paris en cette année 1778, accompagné de sa mère qui se languit de Salzbourg, il est annoncé comme un jeune prodige virtuose, proche du singe savant. A 22 ans, il cherche à s’éloigner de l’influence conformiste de son père qui lui adresse des lettres de remontrance et lui dictant une attitude conformiste. C’est cette période de quelques mois que raconte cette BD originale par le ton et le traitement graphique.

    S’appuyant sur la correspondance croisée du père, de la mère et de Mozart, Duchazeau raconte à merveille les coulisses d’un univers musical marqué de la flagornerie, de l’ignorance, du conformisme, où le public se dispute entre Gluck et Piccinni. Cette tension permanente, dans un univers de noblesse hostile et sotte, entre création et conformisme, cette primauté de l’art, le dessinateur la montre avec force et talent. Plus qu’un physique anonyme et banal, il s’attache surtout à dessiner un caractère, à montrer un génie dont il confronte la petite taille à celle du commun des mortels qu’il inverse symboliquement dans des planches parmi les plus réussies. Etre génial conduit à être incompris et à souffrir.

    « Pourquoi être aimé des Dieux? Si je ne puis être aimé des hommes? ».

    Cette quête de la beauté, l'auteur la traduit avec minutie dans ce qui est l’autre intérêt majeur de la BD: la description d’un Paris sale et ignorant, où l’on sent monter la colère d’un peuple affamé, les prémices d’une révolution à venir. Au contraire des personnages, souvent à peine esquissés, comme Aloysia, amour rêvé et perdu de Mozart, les rues, les bâtiments parisiens sont magnifiquement dessinés, avec précision et justesse. Paris, que Mozart déteste, n’est pas qu’un décor, mais devient un véritable personnage que le musicien fuira, ayant tiré de tristes leçons de son passage. Des leçons vitales cependant pour lui permettre enfin de se libérer des contingences matérielles et des modes superficielles. C’est à Vienne où il s’installera plus tard que commencera sa révolution musicale. Paris aura été un lieu d’apprentissage de vie.