• Conseillé par (Libraire)
    9 mai 2022

    Ludique et enrichissant

    « Faire descendre les classiques de leur piédestal » tel est le credo exprimé par Catherine Mory dans la préface. Pourquoi se lancer dans une tirade du Misanthrope alors que la vie de Molière, les conditions de création de la pièce peuvent offrir des portes d’entrée ludiques au texte? Du Lagarde et Michard, Catherine Mory et le dessinateur Philippe Bercovici, ont conservé la division par siècle en partant des années 1500 avec, comme au temps du lycée, Du Bellay, Ronsard, Rabelais, pour terminer avec le XX ème siècle. Trente quatre autrices et auteurs (dont seulement cinq femmes) sont ainsi décryptés, choix bien entendu subjectif mais qui ne met de côté pratiquement aucun écrivain majeur.

    Amusant, juste et dense. Abandonnée sur la table de salon ou rangée soigneusement dans les livres scolaires, cette histoire littéraire « revisitée » peut se picorer à toute heure de la journée !

    « Faire descendre les classiques de leur piédestal » tel est le credo exprimé par Catherine Mory dans la préface. Pourquoi se lancer dans une tirade du Misanthrope alors que la vie de Molière, les conditions de création de la pièce peuvent offrir des portes d’entrée ludiques au texte? Du Lagarde et Michard, Catherine Mory et le dessinateur Philippe Bercovici, ont conservé la division par siècle en partant des années 1500 avec, comme au temps du lycée, Du Bellay, Ronsard, Rabelais, pour terminer avec le XX ème siècle. Trente quatre autrices et auteurs (dont seulement cinq femmes) sont ainsi décryptés, choix bien entendu subjectif mais qui ne met de côté pratiquement aucun écrivain majeur.

    Utilisons les adjectifs pour décrire ce gros ouvrage que l’on peut ouvrir comme un dictionnaire, aux pages voulues au gré des envies ou des nécessités même si chaque siècle est éclairé d’un texte introductif remarquable pour replacer chaque auteur dans le contexte littéraire et historique de l’époque.

    Le premier adjectif serait « amusant » démontrant ainsi le pari initial réussi: instruire avec le sourire. A ce titre le dessin joue à merveille son rôle ludique. Les figures et les silhouettes connues telles celles de Sartre, Balzac ou Colette prennent une coloration spéciale, une forme de distanciation entre caricature et ressemblance comme les anecdotes mises en images, traitées en véritables gags de quelques cases. Ce sont les biographies, par quoi tout commence, qui se prêtent le mieux à cet exercice de l’humour. L’univers enfantin de Flaubert ou la vie de Rabelais donnent à sourire et les évènements de la vie deviennent de petits sketches dignes des comics.

    Autre adjectif: celui de « justesse » auquel on peut accoler l’érudition. Rendre accessible ne signifie aucunement simplifier, raccourcir. Il s’agit bien de raconter l’essentiel d’une vie et de décrire les traits principaux des oeuvres majeures de chacun des auteurs choisis. A cet égard, le chapitre consacré à Céline, nouveau venu dans cet ouvrage, démontre la pertinence et la justesse du récit. En 16 pages, la vie de l’écrivain de Meudon qui s’entrecroise en permanence avec son oeuvre, est décrite avec minutie et précision, jetant les ponts entre la fiction et l’existence réelle. Voyage au bout de la nuit où Mort à crédit sont décryptés à l’aune des choix de Céline, choix de vie mais aussi choix politiques. Rien n’est dissimulé du génie créateur aux écrits antisémites abjects et odieux. Même la découverte récente des manuscrits laissés à Paris et retrouvés en 2021 est évoquée en une case.

    Dernier qualificatif possible: « densité ». Rarement un lecteur apprendra autant de choses en peu de cases dessinées. Le dessin complète en effet des textes pesés mot par mot ou rien n’est inutile. Vous apprendrez ainsi l’origine de la formule du « Mouton de Panurge » et décrypterez pour l’essentiel des oeuvres comme « Les Misérables ». Les auteurs ouvrent des portes pour donner envie au lecteur d’aller plus loin.

    Abandonnée sur la table de salon ou rangée soigneusement dans les livres scolaires, cette histoire littéraire « revisitée » comme on se plait à le dire désormais en terme culinaire, est un plat majeur: digeste et agréable au palais. On peut le picorer à toute heure de la journée, en entrée ou en dessert. Une invite à déguster ensuite, seul, le plat principal.